Olivier Ertz est professeur responsable de la filière Ingénierie des Médias à la HEIG-VD. Avec une équipe de recherche issue des diverses Hautes Ecoles romandes et du senior-lab, il mène le projet Mobilité Douce des Seniors (MoDoS).

Professeur Olivier Ertz, pouvez-vous nous présenter brièvement les défis du projet MoDoS ?

La mobilité pédestre est facteur d’autonomie, de bien-être, de santé, et elle doit être encouragée à tous les âges. D’un côté, l’espace public urbain doit être adapté autant que faire se peut. D’un autre côté, c’est à l’usager de s’adapter avec ses contraintes propres de marcheur.

MoDoS se focalisant sur la mobilité urbaine pédestre d’une population amenée à croître, les seniors, Le premier défi à souligner concerne notre capacité à modéliser le comportement du piéton senior pour qualifier les tronçons d’un réseau pédestre selon un niveau de service pour senior. A partir de ce modèle, le principal défi concerne alors véritablement la capacité de collecter les données du terrain, toutes ces caractéristiques utiles qui ne sont jamais prises en compte quand vous utilisez un classique outil qui vous calcule l’itinéraire d’un lieu de départ à un lieu d’arrivée, le plus court, le moins onéreux, éventuellement le plus pittoresque. Pour MoDoS, il importe de connaître la largeur de trottoir, la présence d’obstacle, l’absence d’abaissement de trottoir, la présence d’un îlot de traverse, voire la durée d’un feu de passage piéton ou même si tel ou tel tronçon pédestre est fortement incliné, ombragé, relativement calme, avec banc pour une pause, autrement dit tout ce qui participe positivement ou négativement à l’expérience piétonne du senior. En découle un troisième défi, celui de garantir la qualité des données, dont notamment son actualité, et ce afin que l’outil de calcul d’itinéraire fournisse des résultats fiables, c’est-à-dire un outil auquel on peut se fier.

Pourquoi les ingénieurs ont-ils décidé de travailler en collaboration avec les seniors, par le biais du COSY et du senior-lab notamment ?

Bien sûr, pour définir un modèle de niveau de service pour le déplacement des seniors en milieu urbain, ce sont les usagers seniors qui le pratiquent qui le connaissent le mieux. Aussi, c’est la méthodologie centrée-utilisateur qui nous amène à mettre le futur utilisateur senior au coeur du projet, pour concevoir un outil numérique appropriable, utilisable et qui réponde au besoin. Mais surtout la collaboration avec les seniors participe de l’approche générale du projet, celle de compter sur et d’encourager la participation citoyenne. En effet, si nous souhaitons développer des outils logiciels, des algorithmes comme on aime à dire aujourd’hui, avec une certaine intelligence, le dispositif a besoin de l’humain pour fonctionner, de la collecte et mise à jour des données de terrain à la validation des résultats automatiques générés. Comme nous avons décidé de sélectionner des tronçons-pilotes au coeur d’Yverdon-les-Bains, le COSY et le senior-lab ont été les deux partenaires naturels de notre projet.

A quoi ressemblera cette collaboration, concrètement ?

Pour le projet MoDoS, il est d’abord prévu d’impliquer des seniors du COSY pour un atelier terrain dit « atelier promenade » afin de recueillir des informations sur le comportement du piéton senior au coeur de la ville d’Yverdon-les-Bains et identifier des obstacles sur l’environnement piétonnier. S’en suit un atelier de synthèse qui doit permettre d’étoffer encore l’analyse et de dégager les premiers paramètres du modèle. Entretiens, observations, tests utilisateurs, questionnaires sont aussi tous les outils méthodologiques qui nécessitent l’implication des seniors tout au long du processus de conception du produit final. En cela, MoDoS représente une opportunité pour les seniors de s’engager dans un projet de Ra&D typique de ce qui se fait dans une HES, et c’est une superbe opportunité pour les HES de déployer des projets de science citoyenne et participative.

Olivier Ertz, merci !